Aperçu sur la poésie vietnamienne de la décade pré-RÉvolutionnaire



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APERÇU SUR LA POÉSIE VIETNAMIENNE DE LA DÉCADE PRÉ-RÉVOLUTIONNAIRE

PAR


DƯƠNG ĐÌNH KHUÊ et Nicole LOUIS-HÉNARD

[Dossiers OCR corrigés par Lê Văn Đặng]


I. REGARD SUR LE CLIMAT POLITIQUE, ÉCONOMIQUE ET SOCIAL DES ANNÉES

PRÉ-RÉVOLUTIONNAIRES

Dans l'histoire littéraire de toute nation, on voit surgir parfois, à la faveur de certains concours de circonstances, des mouvements qui s'opposent avec violence aux normes établies. Ce fait s'est déjà produit dans l'ancienne société vietnamienne, habituellement figée dans l'admiration et le culte du passé. Nous connaissons le magnifique épanouissement de la littérature vietnamienne vers la seconde moitié du XVIIIe siècle1, nous aborderons aujourd'hui un mouvement non moins brillant qui prit son essor dans la décade précédant la révolution de 1945 et dont on peut dire qu'il dure encore actuellement, bien que déjà s'amorcent d'autres tendances trop complexes pour être clairement analysées.

Au cours des années 30, la littérature vietnamienne fut secouée par des éléments perturbateurs, tout comme près de deux siècles auparavant2. Mais elle se transforma encore plus radicalement. Quelles furent les raisons de cette effervescence ?

Il y eut d'abord la domination française à partir de 1864. Mais la réaction qu'elle suscita au début fut plutôt politique que littéraire. D'ailleurs, très habilement la France respecta le vieux système d'éducation et les concours littéraires eurent lieu jusqu'en 1918. La véritable révolution littéraire ne se déclencha qu'à partir de 1930, époque à laquelle des événements d'une importance considérable eurent lieu.

A cette époque, les jeunes nés vers 1910 atteignirent l'âge adulte. Au lieu de recevoir l'éducation chinoise traditionnelle, ils avaient reçu un enseignement moderne. De 1906 à 1908 fonctionna l'école [432]0 Đông Kinh Nghĩa Thục, école purement vietnamienne qui ouvrit les esprits à une structure nouvelle de la langue en romanisant l'écriture de celle-ci.

C'est vers 1912 que parut la première revue littéraire3, incitant les lecteurs à se former à l'école du Quốc Ngữ . La jeune génération scolarisable au cours de cette période se trouva donc être la première éduquée à l'école de l'occident puisque le Quốc Ngữ donnait accès directement aux idées modernes. En même temps la culture française était dispensée dans les établissements scolaires et à l'Université de Hanoi. Cette génération fut donc très réceptive aux événements politiques en particulier à l'échec de l'insurrection du Parti Nationaliste du Vietnam à Yên-báy, le 10 février 19304.

D'autre part la crise économique mondiale amena au Vietnam comme partout ailleurs, des faillites sans nombre et entraîna chômage et misère. Les jeunes intellectuels surtout se virent fermer la porte des administrations publiques, seule carrière à laquelle les avait préparés l'éducation reçue.

Il en résulta un certain désarroi qui conduisit à un réveil de la conscience nationale. L'impitoyable répression consécutive aux événements de Yên-báy incita un certain nombre de jeunes, politiquement très engagés, à se tourner vers la vie clandestine ou à s'expatrier pour se préparer à une lutte ultérieure. D'autres reprochaient à l'ancienne culture basée sur une morale sociale et familiale désuète mais encore en vigueur chez les gens d'âge mûr, les heurts entre générations. Quant à la majorité des jeunes gens aspirant à vivre paisiblement en dehors de toute préoccupation patriotique, elle se laissait gagner par un mécontentement en regard de l'ordre établi, une animosité contre les mandarins et les parvenus qui monopolisaient richesses et honneurs.

Quelques années plus tard, une fois la crise passée, la France chercha bien à apaiser les esprits par une politique plus compréhensive de collaboration en ouvrant largement les carrières administratives, en donnant aux autochtones un semblant de représentation nationale, en démocratisant les sports et les compétitions sportives, et surtout, sous la pression du Front Populaire, en adoucissant le régime pénitentiaire et celui de la presse. Mais la Seconde Guerre Mondiale allait tout remettre en question, surtout après la défaite française de juin 1940 et l'immixtion du Japon, quelques mois plus tard, dans les affaires indochinoises.

Tout le monde se sentait vivre au pied d'un volcan dont les grondements sourds annonçaient l'explosion. Cependant une partie de la jeunesse se refusait à croire au danger et préférait s'adonner aux [433] plaisirs insouciants de l'instant, tandis que l'autre, politisée, s'inquiétait déjà de bâtir un Vietnam nouveau dont elle sentait confusément la venue proche et parlait, écrivait et même agissait.

Toute cette période de remous, de 1935 à 1945, eut des répercussions sur les œuvres littéraires de cette époque. Sur ces entrefaites la revue Nam-phong5 se trouva privée de son directeur Phạm Quỳnh6 appelé au Gouvernement Impérial de Huế et cessa de paraître en décembre 1934. Cette date peut être retenue pour marquer le déclin de la littérature ancienne et confirmer la naissance de la littérature nouvelle dont les principales caractéristiques furent :

1. Utilisation de la littérature comme moyen de réformer la société.

2. Floraison de nouveaux genres littéraires.

3. Victoire de la poésie moderne sur la poésie classique.

1. La littérature est avant tout un moyen d'expression. Mais dans les temps anciens, en dehors évidemment, des proclamations patriotiques et officielles, les lettrés décrivaient surtout leurs états d'âme, leurs joies, leurs tristesses, leurs conceptions du monde, leurs comportements devant l'adversité. En vérité, la littérature ancienne était surtout lyrique et philosophique, évoluant presque exclusivement dans l'univers moral alors que le monde extérieur était entravé par l'inertie millénaire de l'éducation, des rites, de la structure sociale et des institutions politiques.

Nous avons vu7 que l'intervention française en Cochinchine avait à la fin du XIXe siècle remué quelques peu le milieu des lettrés ...

Les uns déçus par les rouages de la vieille société vietnamienne se tournèrent vers les Français (Tôn Thọ Tường) les autres au contraire se replièrent dans un refus farouche (Phan Văn Trị). Ces fermes prises de position firent sortir les lettrés de leurs tours d'ivoire. Ils se lancèrent alors dans des polémiques politiques et aiguisèrent leur verve satirique sur les travers de la société ancienne en voie de décomposition (Trần Tế Xương) et sur ceux qui s'y complaisaient encore. Malgré tout il n'y avait pas de révolution littéraire, la forme demeurait classique pour traduire un fond qui, lui, évoluait et abandonnait les thèmes chers aux anciens pour exprimer l'indignation ou le désarroi du lettré devant une société qu'il ne reconnaissait plus.

Polémiques et satires ne visaient pas à transformer cette société, par contre, les écrivains des années 30, à la différence de leurs aînés, cherchèrent à faire passer un message d'ordre social et civique :

— réveiller discrètement le patriotisme assoupi dans la subordination ou dans l'indifférence sans toutefois provoquer la censure,

— saboter les bases de la société en encourageant les jeunes à secouer [434] la tutelle familiale, et en excitant contre les injustices sociales l'indignation du peuple, aussi bien des gens fortunés, que des malheureux indigents qui se résignaient placidement à leur sort misérable sans chercher à s'en libérer,

— exhorter la jeunesse à vivre une vie d'aventures, montrer la bassesse et l'incurable ennui de la vie bourgeoise, etc.

2. Pour arriver à ses fins, cette littérature de combat fut amenée à faire feu de tout bois: usant de la poésie, du reportage, de l'essai, du théâtre, de la nouvelle et surtout du roman, son arme préférée, qu'il fût historique, de mœurs ou à thèse. Ainsi, à partir de 1930, la floraison des genres littéraires nous semble être non seulement un phénomène nouveau, mais surtout une conséquence inéluctable de l'atmosphère politique, sociale et psychologique de l'époque.

3. Enfin, un autre aspect de la tendance combative de la littérature moderne, est qu'elle différa profondément quant à la forme et à la technique de la littérature traditionnelle. Elle y était obligée pour mieux se faire comprendre, mais elle y avait été aidée par le fait que la majorité des jeunes écrivains était de formation culturelle française. A l'école des maîtres français, en effet, les romanciers, reporters, essayistes, apprirent à alléger leurs phrases, à les rendre plus alertes, plus vivantes, plus incisives. Tous les genres : roman, reportage, portrait, paysage et dialogue, furent composés avec une technique toute autre que celle à laquelle les anciens écrivains avaient habitués le lecteur. Mais là où la révolution littéraire se fit sentir le plus vivement et le plus magnifiquement, ce fut incontestablement dans le domaine de la poésie. Celle-ci prit un nouvel essor et donna naissance à un genre littéraire nouveau qui fut baptisé « thơ mới » c'est-à-dire : poésie moderne.


II. QUELQUES CARACTÉRISTIQUES DE LA POÉSIE MODERNE

Par ce terme de poésie moderne nous entendons d'abord celle qui, en s'inspirant de la poésie française, se libéra des contraintes imposées par la prosodie ancienne, et particulièrement celles édictées sous la dynastie chinoise des T'ang (nhà Đường), quant au nombre de pieds de chaque vers, à la succession des tons aigus et graves, à la place des rimes, au parallélisme des sentences, au plan général du poème dont chaque vers avait un rôle bien déterminé à remplir : introduction, explication du sujet, développement, conclusion étant fixés selon des règles immuables.

Les formes les plus usitées de la poésie classique étaient, nous le rappelons pour mémoire :

— le ngũ ngôn et le thất ngôn, assujettis aux règles T'ang (Đường luật), qui ont des vers de 5 ou 7 pieds, [435]

— Le lục bát et le song thất lục bát8 qui sont de cadence essentiellement vietnamienne.

Le « thơ mới » a brisé ces moules. Les écrivains adoptant ce genre nouveau rejetèrent la métrique ancienne, et ses cadres rigides, et employèrent indifféremment des vers de 7, 8 ou même 10 pieds. Mais surtout, ils introduisirent de nouveaux systèmes de rimes.

A vrai dire, dans la poésie classique on trouve aussi certaines formes de poèmes, le cổ phong et le từ9, dont la structure s'écarte notablement des règles T'ang, tout en respectant d'autres règles beaucoup plus variées mais tout aussi rigoureuses, qui leur sont particulières. Et le lecteur non avisé pourrait prendre un « từ » qui date de mille ans pour un poème moderne. Ce n'est donc pas simplement la forme qui distingua la poésie moderne de la poésie classique, bien qu'elle ait joué un rôle fondamental dans la révolution littéraire en délivrant le poète de la sacro-sainte vénération pour les règles désuètes et rigides, qui ne lui permettaient pas de suivre le cours impétueux de ses pensées.

La révolution littéraire s'affirma encore et bien mieux par ses thèmes nouveaux, par la tournure d'esprit de ses auteurs résolument individualistes qui n'hésitèrent pas à donner une place importante à leur originalité au lieu de se cantonner dans le style impersonnel des anciens lettrés. Fait symptomatique de cette victoire de l'individualisme sur la contrainte sociale, le poète moderne ne craint pas de faire étalage de son MOI, ce MOI que les autres anciens cachaient si pudiquement. Pour désigner la première personne, la langue vietnamienne dispose de plusieurs vocables qui diffèrent suivant la personne à qui on s'adresse (anh, em, cháu, ông, bà, cậu, mợ, etc.); de ces nombreux mots les deux plus importants sont : TÔI et TA. Le premier a un sens individualiste très caractérisé, tandis que le second est beaucoup plus neutre, beaucoup plus général et courtois. Dans la poésie classique, on chercherait en vain le TÔI. Bà Huyện Thanh Quan10, dont la sensibilité sur-aiguée vibra devant le spectacle grandiose du Col de Đèo Ngang (Porte d'Annam), n'a osé que s'écrier :

Dừng chân ngãnh lại : trời, non, nước,

Một mãnh tình riêng ta với ta.

Debout, je contemple, le ciel, la montagne et la mer,

Dans cette immensité mon cœur est seul avec lui-même.

Dans la poésie moderne, au contraire, il y a une véritable orgie du TÔI :

Anh đi đường anh, tôi đường tôi,

Tình nghĩa đôi ta сó thế thôi. (Thế Lữ)

[436] Vous suivrez votre chemin, et moi le mien,

Car notre amour doit prendre fin ici.

Nếu biết rằng tôi đã lấy chồng.

Trời ơi người ấy có buồn không ? (T.T.Kh)

S'il savait que je suis mariée,

Mon Dieu, en serait-il chagrin ?
III. ORIGINES DE LA POÉSIE MODERNE

A vrai dire, la poésie moderne avait eu déjà des précurseurs avant 1935, avec deux remarquables écrivains appartenant à la vieille génération, mais chacun de formation culturelle très différente : Nguyễn Văn Vĩnh et Phan Khôi. Nguyễn Văn Vĩnh faisait figure d'ancêtre auprès des jeunes écrivains de 1935, puisqu'il naquit en 1882. Néanmoins, il avait eu la chance d'être initié de bonne heure à la culture française. Peu après être sorti du Collège des Interprètes en 1896, il fut nommé secrétaire des résidences, et en 1906, grâce sans doute à son intelligence hors pair qui le fit remarquer par ses chefs, il fut désigné pour se rendre en France assister à l'Exposition de Marseille. De retour au Viêt-Nam, il démissionna et se consacra au journalisme. Il dirigea successivement plusieurs journaux et revues en vietnamien, et même un journal en langue française « l'Annam Nouveau ».

Laissant délibérément de côté son activité politique et même ses œuvres littéraires en prose, nous ne voulons citer ici que sa très remarquable traduction en vers des Fables de La Fontaine, où Nguyễn Văn Vĩnh s'est révélé un poète hors pair. Il semble que dans le but de gagner ses compatriotes à la cause de la littérature française, il se soit efforcé de leur en révéler non seulement la nouveauté des idées, mais aussi la beauté de la forme. Et il y réussit merveilleusement en employant des impressifs11 qui donnent de la musicalité à la traduction (kêu ve ve) et en usant surtout du parler courant. Savourons cette traduction pétillante de « La Cigale et la Fourmi » que connaissent par cœur tous les écoliers vietnamiens et que les Vietnamiens savourent, autant que les Français goûtent le texte original.

Con ve sầu và con kiến.

Con ve sầu

Kêu ve ve

Suốt mùa hè.

Đến kỳ gió bấc thổi,

Nguồn cơn thực bối rối.

Một miếng cũng chẳng còn,

Ruồi bọ không một con.

[437] Vác miệng chịu khúm núm,

Sang chị Kiến hàng xóm

Xin cùng chị cho vay

Dăm ba hạt qua ngày.

— Từ nay sang tháng hạ,

Em lại xin đem trả,

Trước thu, thề Đất Trời

Xin đủ cả vốn lời.

Tính Kiến ghét vay cậy,

Thói ấy chẳng hề chi.

— Nắng ráo chú làm gì ?

Kiến hỏi ve như vậy.

Ve rằng : Luôn đêm ngày,

Tôi hát, thiệt gì bác ?

Kiến rằng : Xưa chú hát!

Nay thử múa coi đây!

Le lecteur remarquera :

1. que les trois premiers vers n'ont chacun que trois pieds, alors que tous les autres vers du poème en possèdent cinq. C'est là une liberté que s'est octroyé le poète pour rendre sensible la stridulation de la cigale durant les journées étouffantes de l'été.

2. que dans l'avant-dernière strophe les rimes masculines (cậy vậy) embrassent les rimes féminines (chi, gì), et que c'est l'inverse dans la dernière strophe où les rimes féminines (ngày, đây) embrassent les rimes masculines (bác, hát). Encore une liberté inconnue de la prosodie classique, et manifestement empruntée à la poésie française.

De la même génération que Nguyễn Văn Vĩnh, bien qu'un peu plus jeune, puisque né en 1887, Phan Khôi12 reçut d'abord une solide éducation traditionnelle qui le fit recevoir bachelier au concours littéraire de 1905. Mais, esprit avancé, il abandonna les caractères chinois qui pouvaient le conduire à la carrière mandarinale, pour s'initier à la culture occidentale. Il en était tellement féru qu'il invoquait à tout propos la Logique dans ses discussions littéraires. C'était un polémiste féroce, qui engagea avec Trần Trọng Kim, Phạm Quỳnh, Lê Dư, etc. des querelles de presse qui passionnèrent tout le pays.

Entre deux polémiques et pour reposer son caractère combatif, Phan Khôi, en bon lettré qu'il était, versifiait aussi. En raison de son esprit positif de logicien, il fit peu de poèmes, mais le peu qu'il fit suivant les normes anciennes est réellement admirable.

Paradoxallement ce fut un court poème, composé probablement pour se distraire ou peut-être même pour choquer quelques détracteurs, qui fit sacrer Phan Khôi poète. Intitulé «Tình già » (Amours passées), il parut pour la première fois dans la revue féminine Phụ Nữ Tân Văn du 10 mars 1932. A cette date la poésie classique jouissait toujours d'un prestige immense [438] et c'est Phan Khôi, un lettré de la vieille génération qui lui porta les premiers coups.

Voici ce poème, d'une facture absolument révolutionnaire, qui fit couler tant d'encre à l'époque :

Tình già.

Hai mươi bốn năm xưa

Một đêm vừa gió lại vừa mưa ...

Dưới ngọn đèn mờ,

Trong gian nhà nhỏ,

Hai cái đầu xanh kề nhau than thở :

— Ôi, đôi ta! Tình thương nhau thì vẫn nặng,

Mà lấy nhau hẵn là không đặng!

Để đến nỗi tình trước phụ sau,

Chi cho bằng sớm liệu mà buông nhau!

— Hay! Nói mới bạc làm sao chớ ?

Buông nhau làm sao cho nỡ ?

Thương được chừng nào hay chừng nấy

Chẵng qua ông Trời bắt đôi ta phải vậy ...

Ta là nhân ngãi, đâu phải vợ chồng

Mà tính chuyện thủy chung ?

Hai mươi bốn năm sau

Tình cờ đất khách gặp nhau,

Đôi cái đầu đều bạc

Nếu chẳng quen lung, đố сó nhìn ra được ?

Ôn chuyện cũ mà thôi.

Liếc đưa nhau đi rồi,

Con mắt còn сó đuôi ...

Amours passées.

Vingt quatre ans plus tôt

Par une nuit de vent et de pluie,

Sous la lumière blafarde d'une lampe,

Dans une chambre minuscule,

Deux jeunes Tếtes rapprochées, se plaignaient :

— O, notre amour est si profond

Mais notre union est impossible.

Afin qu'à l'amour ne succède la rupture,

Ne devrions-nous pas, nous séparer.

— Hélas! Pourquoi ces mots cruels ?

Nous quitter comment le pourrions-nous ?

Vivons nos sentiments.

Si le Ciel veut nous séparer, nous nous inclinerons ...

Nous sommes des amants et non des époux,

Pourquoi songer à la constance ?

Vingt quatre ans plus tard

A l'étranger, le hasard les met en présence

Leurs deux Tếtes sont blanchies.

S'ils ne s'étaient connus si bien, se seraient-ils remis ?

Ils évoquent des souvenirs. Ils se guettent, puis se quittent,

Mais leurs regards se suivent ...

[439] Ce défi, lancé en 1932, déclencha une véritable querelle littéraire : campagnes de presse et même conférences contradictoires furent organisées à Hanoi et à Saigon pour défendre ou stigmatiser ce nouveau genre littéraire. Finalement celui-ci triompha inconstestablement avec l'accueil enthousiaste réservé aux œuvres de Thế Lữ, Xuân Diệu, Huy Cận, etc. Ici comme ailleurs, la roue du progrès tournait inexorablement. Les caractères chinois délaissés à la suite de la suppression des concours littéraires, le nouveau mode de vie copié sur les Français tant sur le plan spirituel que sur la plan matériel, et enfin l'impuissance de la poésie classique à exprimer les aspirations des générations montantes, tout contribua à faire boire le vin nouveau dans des coupes nouvelles.

A cette règle, il y eut cependant d'illustres exceptions; comme Nguyễn Giang et Quách Tấn qui s'insurgèrent contre les excès de la poésie nouvelle en composant des poèmes très classiques de forme, mais cependant très modernes de fond. Nous en parlerons en premier lieu. Puis suivit une pléiade de poètes qu'il serait sans doute très intéressant de grouper en écoles. Cette tâche n'est pas aisée car le recul du temps est encore insuffisant pour apprécier l'œuvre entière de ces auteurs dont certains sont toujours en vie.

On comprendra donc que l'on ait tout au plus tenté une classification provisoire et toute relative des grandes tendances poétiques de la décade 1935-1945. Elles nous ont paru être au nombre de quatre : néo-classique, lyrique, réaliste et impressionniste.


REGARD SUR LE NÉO-CLASSICISME

Face aux auteurs très imprégnés de culture ancienne comme Đông Hồ par exemple, qui restaient en général fidèles à l'art poétique classique, face surtout à la vague montante des adeptes de la poésie moderne en insurrection contre l'ordre ancien dans tous les domaines, les néoclassiques furent relativement peu nombreux.

Ce courant néo-classique est représenté par de jeunes auteurs ayant reçu une éducation française mais n'ayant pas épousé toutes les idées véhiculées par l'Occident. Il ne se distingue du courant ancien que par le fond, les jeunes poètes continuant à écrire en vers classiques, mais exprimant des vues nouvelles, des pensées et des sentiments originaux.

C'était, il faut l'avouer, bien peu de chose face à cette révolution littéraire que fit naître la poésie moderne proprement dite.


Nguyễn Giang

II était le fils du célèbre écrivain Nguyễn Văn Vĩnh. Il publia en 1935 un recueil de poèmes intitulé « Trời xanh thẳm » (Le ciel intensément bleu).

On pourrait s'étonner que ce « retour de France », ayant reçu une éducation purement occidentale, ait préféré faire de la poésie classique [440] plutôt que de s'enrôler comme les autres jeunes sous la bannière de la poésie moderne. Mais Nguyễn Giang était surtout un peintre, et la poésie n'était pour lui qu'un violon d'Ingres, mieux, un moyen d'exprimer en paroles ce que son œil d'artiste lui révélait des formes et des couleurs.

Xuân


Gió xuân phơ phất thổi trong cành,

Lớp-lớp bên đường bóng lá xanh.

Cây cỏ cười tươi hoa mủm-mỉm,

Hoc-sinh qua lại áo phong-phanh.

Chim non ngoài nắng bay chi-chít,

Đàn sáo trong cây vắng khúc tình.

Вờ suối chờ ai chưa thấy lại,

Nhìn cô áo đẹp bướс đi nhanh.

Printemps.

Le vent du printemps agite les branches,

Qui le long des routes se couvrent de feuilles vertes.

La nature sourit de ses fleurs épanouies,

Les écolières passent en robes légères.

Les oiselets, dans le soleil s'envolent en bandes serrées,

Les chants d'amour ne retentissent plus dans les arbres désertés.

Au bord du torrent, je n'ai pas encore vu celle que j'attends,

J'aperçois une belle silhouette qui passe rapidement.

Chaque vers de ce poème est une touche délicate étalée sur la toile pour y retenir une forme ou une couleur. Il s'agit maintenant de peinture moderne aux tons éclatants et non plus d'un pastel aux teintes fondues chères aux anciens.

Ce poème contient le thème de l'absence, idée éternelle aussi bien occidentale qu'orientale. Mais si «un seul être vous manque...» tout n'est pas, pour autant, dépeuplé.

Le dernier vers nimbe le poème d'une touche imprévue de cet humour inconnu des anciens lettrés. Ceci est bien la preuve que l'auteur n'appartient plus à l'univers solennellement morose du passé.



Quách Tấn

Nous connaissons de lui, deux recueils de poèmes, le premier paru en 1939 a pour titre « Một tấm lòng » (Un cœur). C'est deux années plus tard, en 1941 que parut « Mùa cổ điển » (Classicisme).

Autant le style de Nguyễn Giang est naturel, autant celui de Quách Tấn est laborieusement ouvragé. Il est tout à la fois ciselé et condensé d'idées riches à peine effleurées comme le montre le poème suivant :


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